24 févr. 2025
25 sept. 2024
Conversation
On peut se promener avec un chapeau dans un cimetière ? Parce que là… Il tape fort le soleil. C’est probablement une question de respect et je n’en manque pas, mais là, ça cogne... Il est joli le chemin qui mène jusque ici, enfin la route, puisqu’il est écrit route du cimetière. Pourtant, ça ressemble bien à un chemin cette petite bande d‘herbe grasse entre deux jardins clos et arborés. Et puis les voitures y sont interdites. Je me suis demandé si le corbillard allait pouvoir arriver jusqu’ici. Ça aurait eu de la gueule le cercueil porté à l’épaule dans ce petit chemin entre deux murs en pierres. Mais bon. Finalement. C’est pratique cette route qui contourne le village.
Je n’étais jamais venu ici. En même temps il n’y a pas de raison.
On va plutôt rester près de la haie, au moins on peut enlever son chapeau en se mettant à l’ombre. Ils auraient pu penser à mettre quelques arbres dans le cimetière quand même. Enfin, il y en a un. C’est déjà pas mal. Mais il n’était pas pour nous quand on a chanté tout à l’heure. On cramait littéralement. Vous avez vu le carré pour la famille de Mun ? Il y a de tout. Du comte, du vicomte, de la vicomtesse, du marquis et de la marquise, tous morts au siècle dernier. Ça sent la noblesse d’empire. Non ? Enfin, pour ce que j’en connais…
Et donc ça ressemble à ça un caveau moderne. C’est du ciment. Le cercueil repose sur deux plaques de béton juchées au-dessus des cercueils de ses parents. Il semble si seul sur sa dalle. Si petit. La conversation avec sa mère ne va pas être aisée… au travers du ciment. On se fait des idées, hein ?
Qu’est-ce qui dit le monsieur des pompes funèbres ? Il veut savoir si on le met à droite ou à gauche dans le caveau. Ah c’est ça qu’il avait l’air perdu au milieu de rien, c’est un quatre places. Mais il n’y aura plus personne après, ça n’a aucune importance qu’il soit à droite ou à gauche. Il faudrait le laisser comme ça. Oui mais, au cas où…
Monsieur ! S’il faut choisir, mettez-le à gauche ! C’est bien à gauche !
Enfin… j’ai quand même l’impression que le centre lui aurait plus convenu.
Il a toujours eu du mal à choisir.
On se fait des idées, hein ?
6 sept. 2024
"Grossir le ciel" en bande dessinée
Texte de présentation pour une exposition en octobre 2024
En 2018, le romancier Franck Bouysse et les éditions Delcourt cherchaient un dessinateur pour adapter en bande dessinée le roman à succès Grossir le ciel.
Début 2019, lors d’une rencontre littéraire, un libraire a mis mon album Charogne dans les mains de l’écrivain. Ça lui a plu. Au même moment, dans une librairie parisienne, on me conseillait ardemment de lire du Franck Bouysse. Ce jour-là, j’ai acheté Grossir le ciel, dont le style m’a happé par la densité de ses atmosphères, la façon dont il rend palpable les éléments naturels, l’air, le froid, les animaux, et par la tension des dialogues.
En avril 2019, je recevais un mail des éditions Delcourt pour adapter Grossir le ciel. Je répondis immédiatement oui.
Je me suis donc embarqué, avec Franck au scénario et fortement intimidé par la tâche, dans la mise en images de la vie de ces deux paysans solitaires sur un plateau cévenol, au beau milieu de l’hiver 2007.
La technique principale permettant de garder un côté brut et âpre à ce polar rural, est un graphisme au crayon. Je dessine, je gomme, je frotte pour avoir des textures, même infimes, que je retravaille ensuite à l’ordinateur, finalisant la lumière en niveaux de gris.
Mais je ne m’étais pas rendu compte, à la première lecture, qu’il y avait autant de niveaux narratifs différents, des flashbacks, des références à l’enfance, des moments imaginés, des révélations… Il m’a fallu faire varier les traitements au cours de la réalisation de l’album, pour ponctuer l’histoire et augmenter l’expressivité du récit sans le surcharger d’un texte qui deviendrait explicatif.
La base est restée la même, un original dessiné sur papier, mais ensuite, des teintes seules, de l’encrage, des mises en couleur, des dessins en blanc sur fond coloré se sont mis à parsemer ce récit initialement blanc et gris.
J’espère maintenant que cet album ne trahit pas trop l’œuvre originale, ou plutôt, la trahit du mieux possible...
1 mai 2024
14 sept. 2022
Découpage
Travail de découpage en cours pour l'adaptation du roman de Franck Bouysse "Grossir le ciel"
(éditions Delcourt)
22 avr. 2022
– Une bande dessinée sur Jack London ?
– Non, un autre journaliste, Albert Londres... à Shanghai.
– Londres à Shanghai ?
– Oui, on peut dire ça. En plus il y avait une concession internationale créée par les Britanniques
à l’époque.
– Quelle époque ?
– 1932.
– En 1932 ? C’est Le Lotus bleu votre scénario ?
– C’est effectivement l’histoire d’un journaliste qui se retrouve pris dans différents trafics et, vu
l’époque, on ne peut pas ne pas parler de l’opium.
– Mais c’est vrai votre histoire, là ?
– Frédéric Kinder s’est inspiré de différentes sources. Tu peux commencer à lire La Guerre à
Shanghai, c’est le recueil des derniers articles de Londres.
– Il y avait une guerre ?
– Oui. Albert Londres a couvert le conflit sino-japonais qui se déroulait là-bas. Mais ce n’est pas
le sujet du livre.
– Donc vous me proposez un récit inspiré de faits historiques qui se déroule en 1932 en plein
milieu d’une guerre dans une ville improbable qui se trouve en Chine mais pas vraiment
chinoise. Tu sais que je ne connais rien à la Chine, mais alors rien du tout, l’écriture, l’histoire, la
façon de vivre... Je vais passer des plombes à chercher de la documentation pour finalement
me planter.
– ...
– Bon... Je vais y réfléchir. Il faudrait vraiment que le personnage me plaise, mais a priori c’est
non.
(Dialogue avec mon éditeur. Texte écrit pour le dossier de presse).
Albert Londres doit disparaître sort le 11 mai 2022.
Scénario : Frédéric Kinder
Dessin : Borris
Couleur : Brice Follet
éditions Glénat. Collection 13 étrange